Je ne sais pas si les journées mondiales servent à quelque chose. En tout cas, j’avais lu sur les réseaux sociaux que le 15 octobre était la journée mondiale de sensibilisation au deuil périnatal; en même temps d’ailleurs que la journée internationale des fossiles ou la journée mondiale du lavage des mains… A vrai dire, je ne me sens pas excessivement concernée par cette journée. Si j’ai bien fait 4 fausses couches, je n’ai pas vraiment le sentiment d’avoir vécu des deuils périnataux. Un deuil pour moi, c’est de perdre un « vrai » bébé et même si deuil d’une grossesse il y a au moment de la fausse couche, je n’ai pas, je crois, eu de deuil d’un enfant existant ou imaginé à faire. Cependant, je ne peux pas le nier, ces épreuves m’ont impactée et ont de conséquences sérieuses à mon sens sur ma façon de vivre cette dernière grossesse.
On dit souvent que l’espoir fait vivre et pourtant, cette phrase m’a toujours parue bien banale. Croire pour juste garder l’espoir en quelque chose, ce n’est pas franchement mon état d’esprit. Je suis cartésienne, je crois en la science, et j’ai toujours demandé aux médecins de me donner des statistiques pour appuyer leurs dires (ce qui ne plaît d’ailleurs pas toujours). Cependant, je suis aussi croyante, je crois en tout cas très fort au pari de Pascal et je n’ai pas beaucoup de certitudes dans la vie.
Le parcours de l’infertilité n’était pas vraiment quelque chose que j’envisageais de vivre un jour. Après tout, j’ai eu 2 enfants en 19 mois, sans aucun difficulté. Nous avons toujours envisagé d’avoir 3 enfants. Pourquoi? je ne l’explique pas vraiment, c’est un nombre qui s’est imposé à nous. 2 c’est trop peu, 4, à Paris, ça devient vite compliqué. 3 c’est bien, c’est un beau triangle et j’aime cette géométrie. Et puis il y a eu l’infertilité donc. Du moins, ce n’est pas comme cela qu’on l’a tout de suite nommée. Une fausse couche. Pénible celle-là. Mal gérée par ma gynéco de l’époque. 3 mois, 1 hémorragie plus tard et quelques complications, nous revoilà dans les starting-blocks. Une fausse couche, c’est un détail de l’histoire, une anecdote qui arrive à beaucoup de monde.
Il y a seulement un an, je croyais que l’infertilité, c’était chez les autres. Je nous pensais « immunisés », avec nos 2 enfants en 19 mois. Et puis, de fausse couche en fausse couche, d’analyses en mauvais résultats, j’ai appris que l’infertilité secondaire s’était invitée dans nos vies.
Tout le monde sait ce qu’est l’infertilité, mais l’infertilité secondaire est un peu plus complexe. Certains couples, comme nous, n’ont aucun problème pour avoir un premier enfant, et tout simplement « n’y arrivent plus » quand l’envie d’avoir le second ou le petit dernier se fait sentir. Parfois il n’y a pas d’explication médicale, souvent, bien plus souvent qu’on le croit, l’âge est responsable.
Il y a des habitudes que j’aimerais ne pas avoir. Par exemple, celle de savoir à quelle heure aller au laboratoire d’analyses pour ne pas attendre trop longtemps. Ou celle de connaître à l’avance le fait que la dame me dira gentiment qu’elle fait passer mes analyses en urgence, avec un petit coup d’oeil complice et compatissant. Il y a aussi l’habitude d’avoir le numéro du labo qui s’affiche sur mon téléphone, alors que je n’ai pas reçu les résultats. Ils m’appellent toujours pour m’annoncer la mauvaise nouvelle de vive voix, un peu comme si c’était plus facile, peut être pour eux, ou pour moi, je ne sais pas.
On dit souvent que la foudre ne tombe pas deux fois au même endroit. Je crois que c’est surtout pour se rassurer. On sait bien qu’on peut vivre des drames en parallèle, et que la vie ne va pas vous épargner sous prétexte d’avoir déjà souffert. On le sait, cette vie, elle est injuste, aléatoire et parfois on tire la boule noire un peu plus souvent qu’on ne le voudrait.
Je n’avais pas vraiment prévu de vous reparler de fausse couche. Parce que j’en ai déjà beaucoup parlé ici, même si j’ai essayé de le faire avec pudeur. Je n’avais pas prévu de revivre ça. Comme je n’avais pas prévu de tomber enceinte juste avant d’entrer dans des protocoles plus médicalisés. La surprise était douce, bonne, heureuse. Nous étions très heureux. J’étais confiante tout en essayant de ne pas m’investir trop. J’attendais tranquillement que le temps passe, sans y penser, malgré le ventre qui pousse à une vitesse grand V quand il s’agit d’une quatrième grossesse, les nausées et tous les petits désagréments qui ponctuent un premier trimestre de grossesse.